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14 septembre 2007 5 14 /09 /septembre /2007 13:20

CROISEECHEMINS.jpg

Dans ma présentation du roman Le liseur de l´Allemand Bernhard Schlink intitulée l´amour et le destin d´une génération, j´avais introduit un long passage sur les réponses insatisfaisantes d´un père à des questions qu´un fils n´avait pas vraiment posées, car il ne savait comment aborder son père ni comment formuler ses questions : quelle attitude fallait-il adopter devant les actes criminels que les êtres que l´on aime avaient accomplis pendant la Seconde Guerre mondiale ? Faut-il les condamner ou faut-il chercher à les comprendre ? Peut-on encore aimer quand on a compris et condamné ? Je l´avais supprimé car il me semblait secondaire dans la trame générale du roman. Réfexion faite, j´en suis moins sûr aujourd´hui. Il me faut donc y revenir. [ Photo ci contre : Croisée des chemins ]

Le caché transparaît dans la manière dont il cherche à se cacher est une phrase dans Tristes Tropiques de Claude Levi-Stauss que j´ai lue à 22 ans et que je n´ai jamais oubliée. 

Une génération entière d´Allemands ne pouvait ignorer les atrocités que l´on infligeait aux Juifs pendant la guerre. Le Tambour de Günter Grass le dit clairement. Ses aveux tardifs sur son engagement à l´âge de 15-17 ans dans les Waffen-SS, mais soigneusement cachés soixante ans durant, montent pour le moins qu´il n´était sans doute pas aussi naif qu´il veut bien nous le faire croire. La gêne de ceux et celles qui sont nés après 1945 à la révélation des crimes allemands, montrent qu´ils auraient bien voulu qu´on les oublie, comme certains pères qui fermaient les yeux auraient voulu que l´on pensât à autre chose que de faire des procès.

Dans le roman Le liseur, le procès auquel le héros assiste en tant qu´observateur et étudiant en Droit, reconnait dans l´une des accusées la femme de vingt ans plus âgée que lui qui l´a initié à l´amour sept ans auparavant, et qui exigeait un rituel immuable pendant les six mois qu´ils se sont connus : lecture à haute voix, prendre une douche ensemble, faire l´amour. La fin du procès approche. Il a compris le terrible secret qu´Hanna cache à ses juges accusateurs, et qui explique pourquoi Hanna préfère passer pour plus coupable qu´elle n´est, plutôt que d´avouer sa honte aux yeux de tous. Michaël hésite sur l´atitude à adopter. Que peut-il faire pour l´accusée ? Est-il judicieux de prévenir les responsables du procès ? Il se décide à rechercher le conseil de son père.  

Son père n´est pas d´un abord facile. Professeur de philosophie, il s´enferme la plupart du temps dans son bureau, sans doute, remarque Michaël, parce que son père ne savait que faire des sentiments que ses enfants lui manifestaient. Pour survivre et nourrir les siens, son père, - après avoir été privé de son poste de maître assistant de philosophie pour avoir annoncé au début de la guerre un cours sur Spinoza, - avait dû travailler jusqu´à la fin de la guerre comme responsable dans une maison d´édition spécialisée dans la publication de cartes et de guides de randonnées pédestres. En tant que philosophe, - car il est certain que c´est le philosophe que son fils vient consulter -, il est désolé de ne pouvoir l´aider. "En tant que père, être incapable d´aider ses enfants est une expérience quasi intolérable".

Michaël a alors le sentiment que son père aurait pu l´aider davantage. Il sent aussi que son père devait en avoir conscience ; qu´il aurait pu consacrer plus de temps à ses enfants ; qu´il savait même comment il aurait pu aider. Mais son père s´était levé, non pour clore l´entretien, mais, se tenant les reins de ses mains, parce qu´il avait besoin de soulager son dos qui lui faisait mal. Le père assure alors au fils, en le regardant : "Reviens quand tu veux". Le chapitre s´achève par un laconique : Je ne le crus pas et je fis signe que oui.

Hanna, l´accusée aimée, cache sa honte. Le père philosophe cache sa gêne. Les deux se taisent. Que faut-il privilégier dans le non-dit du second ? La gêne d´un père ? Son embarras de philosophe ? Ou le silence du citoyen ayant su bien plus tôt qu´on ne l´ait dit les crimes perpétrés envers les Juifs ?

Pour Pierre Assouline, Le liseur est d´abord un roman sur la trahison, l´oubli et la fidélité. Il est aussi, estime-t-il un livre sur l´ambiguité. Il est sans doute aussi, je crois, un roman sur la honte d´avoir fermé les yeux puis de s´être tu alors qu´on savait. Il admet dans une humilité qui l´honore, que Le liseur a été le déclencheur de La Cliente, son premier roman, - roman sur la délation des Francais pendant la Seconde Guerre mondiale. Il va de soi que le biographe qu´il est ausssi signale ses sources qu´il appelle des reconnaissances de dettes quand il écrit ses Eclats de biographies. Il souhaiterait que les romanciers d´aujourd´hui fassent de même pour les oeuvres qui s´appuient ouvertement sur la consultation systématique d´enquêtes historiques ou même d´archives, quelles soient inédites ou non, afin de permettre au lecteur d´avoir, s´il le souhaite, recours aux sources. Il pense en particulier au Goncourt 2007 de Johathan Littell Les Bienveillantes. Après tout, pourquoi pas ? J´ai osé donner mon propre petit point de vue. Il me semble cependant qu´une reconnaissance officielle de dettes ne rendra jamais totalement compte de ce qui peut sourdre de l´inconscient, et ressurgit, sans que l´on sache vraiment pourquoi, après quelquefois de très nombreuses années de latence.

Pierre Assouline affirme qu´il ne sait pourquoi Le liseur a déclenché chez lui le désir d´écrire un  premier roman sur la honte et la délation. Il affirme en même temps qu´il a retenu à jamais la phrase du père de Michaël sur l´expérience intolérable d´un père de ne pouvoir aider ses enfants. Il me semble que ses deux affirmations sont totalement contradictoires. On ne peut pas ne pas savoir pourquoi on écrit La Cliente après avoir lu Le liseur et  se souvenir à jamais de l´aveu terrrible d´un père, même de roman. D´autant que de ne pouvoir aider son fils n´est pas seulement pour le père de Michaël une expérience intolérable, c´est une expérience quasi intolérable. Avec ce quasi que Pierre Assouline passe sous silence, n´est-ce pas, pour le père du roman, laisser entendre au fils qu´il a compris pourquoi il est venu, mais qu´il préfère retourner à ses chers philosophes et esquiver un début de réponse qui engagerait son fils autant que lui ?

Quant à moi : revenir si longuement sur cette phrase d´un père aujourd´hui n´est évidemment pas anodin. Surtout après avoir évoqué certains silences et des non-dits, un manque irrémédiable,  un  ressassement  lancinant autant qu´irritant ; et même écrit une première lettre puis une seconde à un père qui ne peut évidemment répondre. Il s´agit du désir pas si inavoué que cela désormais : écrire un livre nécessaire.

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12 septembre 2007 3 12 /09 /septembre /2007 16:00

Infamie.jpg
[ 13 ] - Cela peut paraître curieux mais c´est ainsi : il n´y avait aucune oeuvre de Chrétien de Troyes dans la bibliothèque de mon père. Je sais qu´il avait un bureau au Havre à la fin de la guerre. Je sais aussi que sa cabine de bateau avait une petite bibliothèque. Il est donc possible, tout compte fait, que ses Chrétien de Troyes étaient à portée de sa main quand il a été arrêté en juin-juillet 1944. Mais ce n´est, tout compte fait, qu´une supposition totalement gratuite.

J´ai su très tôt que mon nom était le même que Lancelot du Lac, enfant dérobé à sa mère par une fée. Mais je ne comprenais pas comment une bonne fée pouvait dérober un enfant, et encore moins comment on pouvait l´élever dans une île au fond d´un lac. J´avais recu un grand livre bleu qui contait son histoire alors que je ne savais pas lire. Les illustrations étaient horribles, d´un bleu criard évoquant de page en page un lac bleu, des bords bleus, et  une grande femme tout de bleu vêtue portant hennin et baguette ; avec, un peu plus loin, un personnage noir appelé Merlin. J´avais recu ce livre en cadeau de je ne sais plus qui. Ma soeur me l´a lu et relu maintes fois. Les illustrations bleues me faisaient peur. Quand je l´ai sorti la dernière fois de ma bibliothèque, je l´ai trouvé laid. J´ai certes hésité, mais je l´ai jeté sans vergogne.

Ce doit être en classe de cinquième ou quatrième qu´ un de mes professeurs de francais a abordé quelques textes du Moyen-Âge. Je me souviens très vaguement de deux ou trois extraits du Roman de Renard, mais je ne me souviens pas qu´il ait parlé de Chrétien de Troyes. Il en a été de même quand je suis entré en Seconde au Lycée Janson de Sailly. J´avais pourtant commencé à lire, mais mon professeur de francais d´alors s´était limité, pour le Moyen-Âge, à quelques extraits de La Chanson de Roland et d´un ou deux exemples de poèmes de Villon pour aborder plus longuement le XVIe avec Ronsard, Du Bellay, Rabelais et Montaigne.

C´est beaucoup plus tard que j´ai fait l´effort de lire enfin du Chrétien de Troyes, à vrai dire contraint et forcé, car Chrétien de Troyes en ancien francais était à mon progamme final d´examen de francais en Norvège.

Le monde entier ou presque connaît Lancelot pour être le chevalier servant de sa dame. On sait peut-être moins que la charrette du sous-titre, Lancelot ou le chevalier à la charrette, signifie charrette d´infamie. On sait sans doute encore moins qu´il a hésité " deux pas pour y monter ". Et on a encore plus oublié que le dédain de Guenièvre la reine vient davantage de son hésitation de "deux pas seulement (...) avant d´ y monter", que d´avoir dû affronter la honte et le déshonneur après y être monté.

Au début était le cheval, et l´homme bien né, pour se déplacer, était cavalier. Pour l´atteindre dans son honneur, il ne suffisait pas de briser son épée, on le privait de sa monture, on l´obligeait à entrer dans la charrette réservée aux bourgeois et aux vilains. La charrette devenait alors, comme pour le Lancelot du lac, "la charrette infamante". Cette charrette, comme le piloris, est donc signe d´opprobe. Le noble qui y monte rompt le code de la chevalerie et devient un paria aux yeux des siens. Ce qu´exige Guenièvre est par conséquent un exemple parfait de fine´armor, d´amour courtois : elle exige que le Chevalier Lancelot soit par amour à son service et sous sa servitude. Ce que Marie, comtesse de Champagne et fille d´Eléonore d´Aquitaine, exigeait finalement que Chrétien de Troyes illustre dans son oeuvre. En écrivant, il était à son service, comme Lancelot était au service de Guenièvre.

Avec le roman Lancelot ou le chevalier à la charrette, la femme est  dame inaccesible et sa volonté souveraine s´exerce sur l´homme qui lui consacre sa vie et son talent sous le regard amusé ou bienveillant de l´époux. L´homme devient ainsi le jouet tout "obéissant" de ses désirs. On imagine l´orgeuil que les dames nobles pouvaient en tirer. Jamais dans la littérature occidentale, on avait vu pareille apothéose. Le chevalier, par servitude et soumission, sera ainsi à mener, pour conquérir le coeur de sa dame, prouesses et exploits héroïques et quelquefois infâmants.

Ayant donc été "obéissant" par amour, Lancelot croit avoir mérité les grâces de sa dame.

  •  Mais quand la Reine voit le Roi
  • Qui tient Lancelot par le doigt,
  • Elle s´est devant lui dressée,
  • Ayant mine de courroucée (...).
  • "A  moi, Sire, ce ne peut plaire
  • Et de le voir je n´ai que faire !"

Pourquoi ce dédain et un accueil aussi froid ? Est-ce pour être monté dans la charrette d´infamie ? Non pas ! C´est pour avoir hésité "le temps de deux pas".

  •  Comment ? n´eûtes-vous pas honte
  • De la charrette et n´hésitâtes ?
  • Moult à contre-coeur y montâtes
  • Quand vous demeurâtes deux pas.
  • Pour cela ne voulus-je pas
  • Vous parler ni vous regarder

On ne saurait imaginer plus complet triomphe de la femme et plus grand abaissement de l´homme.

Le Nouveau Petit Robert 2008 précise à l´adjectif courtois : corteis, vers 1130, de l´ancien francais court "cour". Je comprends donc bien le sens premier de l´adjectif. La littérature et la poésie courtoise sont celles qui sont pratiquées dans les cours seigneuriales. L´amour courtois est donc celui qui est défini et codifié par l´esprit de la chevalerie du Moyen-Âge. Mais dans les exigences et le dédain de dame Guenièvre, à mon âge qui est le mien, - à savoir celui d´un jeune retraité vivant au début du XXIe siècle en Occident, - je ne vois rien de courtois au sens second et moderne du terme : "qui parle et agit avec une civilité raffinée". Les synonymes sont nombreux : affable, aimable, civil, gracieux. honnête, poli. Je ne dispose pas du texte original de Lancelot ou le chevalier à la charrette, mais de plusieurs adaptations en francais moderne, dont une en vers un peu ridicules ( voir ci dessus ...) et deux en prose qui ne valent guère mieux. Cela ne change rien à l´affaire. Je vois en dame Guenièvre et son époux un désir d´humiliation qui n´a rien de courtois.  

NB 1 : On peut refuser ma lecture et même m´envoyer une réclamation. Sachez que le Petit Robert cité ci dessus donne comme exemple : Réclamation courtoise. Refus courtois. Demain, je relirai dans le texte original de Montaigne : "De trois commerces" (III,iii)
NB 2 : Quel titre donner à l´illustration placée en texte de cette contribution ronchonnante ? L´amour plus fort que l´honneur ? Lancelot dans la charrette d´infamie ? Ou encore toute autre chose ?...  ( .... / ... 14 ).
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11 septembre 2007 2 11 /09 /septembre /2007 08:08

MortdeTristan.jpg
[ 12 ] - Mon père possédait un exemplaire de Tristan et Yseut reconstitué par Joseph Bédier à partir de la version dite Thomas d´Angleterre. Je ne l´ai plus. Je l´ai jeté un jour de désarroi suicidaire, il y peu, parmi beaucoup d´autres livres. C´est un des rares livres que je regrette avoir jetés. Quand on désherbe un jardin, les mauvaises herbes ou les pousses arrachées par erreur repoussent  aisément. Il en est tout autrement pour une bibliothèque désherbée. Certains livres sont définitivement perdus. Il faut savoir en faire le deuil. [ Ci contre : Mort des amants ]

J´ignore totalement s´il le volume que possédait mon père était la première édition 1900 ou une édition ultérieure. Elle n´était pas vraiment belle, mais elle avait du chien. Brochée, la couverture était de couleur brun ocre. Il me semble me souvenir que des petites enluminures pâlies et un peu ternes commencaient chaque nouveau chapitre. Contrairement au volume de Villon que mon père possédait, aucun trait de crayon ne se trouvait sous certains mots et aucun mot n´était écrit dans la marge. Le francais était sensiblement celui de nos jours. Le volume, par ailleurs, ne contenait ni introduction ni glossaire. Je peux m´imaginer que c´est pour cette raison que je m´en suis séparé. Peut-être aussi parce que je possédais deux autres éditions fort bien commentées d´éminents spécialites médiévistes. La beauté d´un livre vient pour moi du texte et de sa langue, non de sa reliure ou de son prix. Il paraît que l´on peut rechercher le bouquet d´un grand cru en aveugle. Je ne connais que Borgès qui aimait posséder des livres rares sans pouvoir les lire lui-même.

C´est vers 16 ou 17 ans que j´ai découvert en classe de Seconde au Lycée Janson de Sailly cette légende d´amour et de mort. Quelques années plus tard, j´ai vu dans un cinéma de mon quartier, - Le Saint Lambert si mes souvenirs sont exacts -, L´Eternel Retour, film du réalisateur Jean Delannoy sur un scénario de Jean Cocteau.  Je viens de découvrir que le film date de 1943. Mon père aurait donc pu le voir.

D´après les critiques de l´époque, Cocteau a su admirablement redonner vie à la vieille légende en reprenant le titre "éblouisssant" de Nietzsche : L´Eternel retour. Quand j´ai vu le film à 18 ou 20 ans dans la petite salle de mon quartier, le public a frémi d´horreur lorsque la perfide Yseut aux Blanches Mains ment à Tristan qui se meurt d´attendre son Yseut, la Belle aux cheveux d´or, et lui annonce sans tressaillir la fausse nouvelle : Sachez que la voile est toute noire. Elle est hissée bien haut parce que le vent fait défaut".
 
J´ignore totalement si mon père aimait le cinéma. J´ignore donc s´il pouvait vibrer devant le petit écran comme il pouvait le faire en lisant un livre. Pour ma part j´ai pleuré plusieurs fois, tant dans ma chambre à la lecture de certains romans que dans la salle d´un cinéma. Je crois me souvenir que c´est en voyant Bambi de Walt Disney qu´un film m´a fait pleurer pour la première fois. Je ne suis pas prêt d´oublier les pleurs que j´ai versés à la fin des 400 coups de Truffaut. Je pleure désormais rarement, mais j´ai frémi à une scène pour moi prenante du film télévisé "Napoléon"Yves Simoneau avec Christian Clavier dans le rôle titre ; celle où l´on voit des paysans espagnols affamés et en guenilles, les yeux exorbités devant la mort, brandir des fourches et des rateaux contre des soldats francais qui avancent sur eux la baïonnette au canon. Le réalisateur a bien su rendre l´effroi que Goya a peint dans son plus que célèbre tableau Tres de Mayo.

Même si adolescent je ne savais communiquer mes sentiments, comme j´aurais voulu que mon père m´invite à voir L´éternel Retour de Cocteau et Delannoy ! Peut-être aurait-il voulu le revoir avec moi pour se replonger dans les années où il était encore assez jeune. Peut-être, même, m´aurait-il encouragé à lire la version de Tristan et Yseut qu´il possédait en me conduisant dans sa bibliothèque. 

Autant en hommage aux travaux de recherches des spécialistes du francais du haut Moyen-Âge qu´en souvenir de mon père, mort comme on sait en 1945, et qui aimait posséder des oeuvres dans la langue originale du moyen francais de Villon à Montaigne en passant par Rabelais et quelques autres, je tiens à citer la fin du Tristan et Iseut telle qu´on la trouve dans le manuscrit de Thomas :

  • Tristrans murut pur sun desir,
  • Ysolt, qu´a tens n´i pout venir.
  • Tristrans murut pur sue amur,
  • Et la bele Ysolt par tendrur.
  • Tumas fine ci sun escrit :
  • A tuz amanz saluz i dit.
  • As pensis e as amerus,
  • as emvius, as desirus,
  • As enveisiez e as purvers,
  • (A tuz cels) ki orunt ces vers.  
( Tristan et Iseut. Les poèmes francais. La saga norroise. Textes originaux et intégraux présentés, traduits et commentés par Daniel Lacroix et Philippe Walter. Livre de Poche no. 4521, Collection Lettres gothiques , 1989). ( ... / ... 13 )
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9 septembre 2007 7 09 /09 /septembre /2007 23:17
NePasSeTaire.jpg

Les associations noires et anti-racistes, comme le CRAN ( Conseil représentatif des associations noires de France) et le MRAP, avaient l´année dernière cherché à faire pression sur l´équipe rédactionnelle du Petit Robert pour que l´on changeât la définition du mot "colonisation". Pierre Assouline, avec force, rapidité et brio, avait dénoncé cette ingérence. Très modestement, je m´étais asssocié à cette dénonciation. 

M´étant procuré il y a deux mois environ l´édition 2008 du Nouveau Petit Robert, j´ai pu constater de visu  comme avec d´autres, dont le même PA ... , l´arrivée des nouveaux mots utiles à mon usage et/ou savoureux à mes oreilles, même si j´ai pu constater des manques qui me chagrinent.

Le syndicat majoritaire de la police a pris cette année la relève du CRAN et du MRAP. Il fustige le dictionnaire de donner un mauvaise image de la police parce qu´il cite à la suite de la définition du mot rebeu ou reubeu une phrase du romancier Claude IzzoPierre Assouline - à nouveau - n´en peut plus d´indignation ; avec, en plus cette fois, de l´humour décapant. A lire avec délectation dans sa chronique : Les dictionnaires sous surveillance.

Je ne connais pas le chinois, mais j´ai appris il y a peu que les autorités chinoises ont souhaité moderniser le mandarin. Elles ont ajouté 171 mots à son vocabulaire. J´en ai retenu un : BO DOU. Il désigne les batailles rangées et contradictoires que les blogueurs de Chine organisent sur leur site. Le bo dou est sûrement encore ultra-minoritaire. Mais il est le signe que la Chine s´est réveillée. L´introduire officiellement dans le vocabulaire mandarin est peut-être aussi pour les autorités chinoises une manière de sauver bo dou des eaux troubles de la contestation, et le mettre ainsi sous surveillance. Il me semble en tout cas plaisant de constater que l´empire du milieu se met au parfum. Serait-ce, pour les blogueurs chinois en cette année du cochon, la possibilité de passer l´étroit chas de la cyberdémocratie ? Tout compte fait, nos censeurs hexagonaux sont vraiment trop caves.
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8 septembre 2007 6 08 /09 /septembre /2007 13:17

LeLiseur.jpg

Le liseur de Bernhard Schlink date de 1996 dans l´excellente traduction francaise de Bernard  Lortholary ( Folio no 3158). Son thème est d´une immense ambition. Le résultat est à la mesure de l´enjeu : une réussite étincellante. Que doivent en vérité faire les Allemands qui sont nés après l´époque nazie des informations sur les atrocités de l´extermination des Juifs ? Malraux a affirmé dans je ne sais plus quel contexte : "Juger, c´est de toute évidence ne pas comprendre puisque, si l´on comprenait, on ne pourrait plus juger". Pour le héros du roman Le liseur, - et sans douter l´auteur lui-même qui est juge de profession -, on doit à la fois pouvoir comprendre et condamner.

Adolescent de quinze ans, Michaël fait par hasard la connaissance d´une femme de trente-cinq, trente-six ans au début des années 1960. Il devient son amant. Leur relation durera six mois pendant lesquels l´un de leurs rites consiste à ce que " Le Garcon", comme Hanna l´appelle, lise à haute voix avant de faire l´amour. Lecture, douche, faire l´amour est en effet le rituel de leurs rendez-vous. Jusqu´au jour où Hanna, sans explication, disparaît mystérieusement. Meurtri et humilié, Michaël essaie d´oublier Hanna.

Devenu sept ans plus tard étudiant en Droit, Michaël est envoyé comme observateur lors d´un procès. Il reconnaîtra Hanna parmi les cinq criminelles SS jugées pour avoir laissé périr des femmes dans une église en proie aux flammes alors qu´il aurait peut-être été possible d´ouvrir la porte. Mais elles auraient pu s´enfuir et se soustraire à la surveillance de celles qui avaient la charge de les surveiller. Une mère et sa fille ont survécu. Il ne semble pas qu´Hanna ait été le chef des surveillantes accusées. Il y avait, comme il se doit à la tête du petit camp près de Cracovie où elle avait été affectée jusque pendant l´hiver 1944-1945, - après avoir été de juillet 1943 qu´au printemps 1944 àAuschwitz,- un commandant, des corps de garde et d´autres surveillantes. Mais Hanna était plus jeune et avait au camp de Cracovie de l´ascendant sur les autres. Elle se défend mal. Ses déclarations sont,  sur celles qui possédaient ou non la clef de l´église, contradictoires : ce qu´elle affirme lors du procès est différent de ce qu´elle a déclaré à l´instruction. Ses dénégations ne font que la desservir. Accusée également d´avoir rédigé un rapport mensonger par une des accusées à langue de vipère, elle nie farouchement l´avoir écrit, pour finalement avouer, dans un revirement inattendu, qu´elle en est l´auteur. Sans lui parler, Michaël comprend alors soudain l´insoupconnable vérité, un secret inavouvable qui est pour Hanna une honte ; une honte telle qu´elle préfère passer criminelle et coupable que de révéler son secret.. Hanna est condamnée à perpétuité. Les autres accusées ne seront condamnées qu´ à diverses peines d´emprisonnement. Ce secret, quel est-il ?

Comme anesthésié, Michaël cherchera à analyser ses sentiments divers et contradictoires en interrogeant vers la fin du procès, puis juste après la sentence, d´abord son père, puis le président du Tribunal. Les questions qu´il se pose à lui-même et qu´il n´aborde pas franchement  avec ses deux interlocuteurs, n´auront pas de réponses. Il réussit cependant à réintégrer la vie quotidienne et de continuer à vivre.

Il se marie. Il a une petite fille. Pour éviter la fonction d´accusateur et plus encore de juge, il deviendra historien du droit. Il admettra que sa femme dise que prendre une telle orientation soit une fuite. L´un de ses domaines de recherche sera  le droit sous le Troisième Reich. Il ne parlera jamais d´ Hanna à sa femme, mais quand il lui fait l´amour, c´est à Hanna qu´il pense 

Il divorce.

Il a quelques maîtresses auxquelles il parle d´Hanna. Chacune écoute à sa manière, ce qui permet à chacune d´entre elles de penser surtout à elle-même. Michaël finit par se taire.

N´arrivant pas à dormir, il se met la nuit à lire à haute voix. C´est-à-dire à lire sur cassettes pour Hanna. D´abord les livres qui lui plaisent à lui, puis les propres textes qu´il se met à écrire. Il les envoie à Hanna. Après quatre ans de ces contacts, il recoit d´Hanna une première lettre qui dit qu´elle a bien aimé ce qu´il a écrit. Il en recevra d´autres. Il ne cherchera cependant jamais à la rencontrer, Sauf une fois vers la fin de la détention d´Hanna. C´est juste après cette unique entrevue qu´il décida d´écrire leur histoire, qui est autant son histoire à elle que son histoire à lui. C´est aussi, à dire vrai, l´histoire des Allemands de deux générations : de ceux qui avaient commis des crimes nazis ; de ceux qui les avaient regardé commettre ; de ceux, encore, qui avaient détourné les yeux ; mais aussi de ceux qui auraient dû condamner leurs parents qui avaient toléré que des criminels aient des postes à leurs côtés dans l´Allemagne après 1945. Il s´agit donc bien de ne pas se dérober de condamner. J´attends avec impatience la sortie en francais de Pelures d´oignons de Günter Gras. Mais pour revenir immédiatement au Liseur de Bernhard Schlink, il s´agit aussi de comprendre : comprendre qu´ il est difficile de véritablement condamner un enfant pour l´amour qu´il porte à ses parents, même si ceux-ci sont criminels. Mais il n´est pas exclu que cette rhétorique soit une manière de dissimuler que l´amour pour des parents cherche à atténuer leurs crimes. 

L´amour que Michaël a porté toute sa vie pour Hanna est un réconfort malgré ses mensonges et ses fuites. Un réconfort qui lui permet de lier son histoire personnelle et son amour à une Histoire qui ne lui appartient pas vraiment, même s´il ne peut s´en détacher. Un passé qui est le destin de toute sa génération.

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6 septembre 2007 4 06 /09 /septembre /2007 12:44

Cher Papa,

Hier, j´ai recu par la poste le roman de Lucien Rebatet Les deux étendards. J´ai simplement lu la page quatre de couverture et les deux premières pages du premier chapitre. Mon impression est excellente. Un journaliste-écrivain et auteur de biographies que j´aime beaucoup, Pierre Assouline, a écrit que si on ne retient pas au moins une phrase d´un livre lu, il ne méritait pas d´être lu ( ou quelque chose comme ca ). Dès la première page du roman, une phrase a retenu mon attention. C´est très bon signe : " Les êtres de quelque relief ont à l´ordinaire une seconde naissance". C ´est d´autant plus une bonne augure que j´ai toujours considéré que tu étais né deux fois. Je ne peux dater avec certitude la seconde, mais j´imagine qu´elle remonte au jour où tu as quítté le giron familial vers l´âge de seize ans pour devenir marin. Ma soeur Claudine, qui vit à Paris, devrait pouvoir me le confirmer.

Si j´ai bien compris, tu es sorti du rang. Tu t´es engagé comme mousse, tu naviguais six mois de l´année pour payer tes études et apprendre ton métier sur le tas. Le reste du temps, tu étais à terre, lisais, et passais tes examens. Je crois que ce n´est plus possible aujourd´hui. C´est ainsi que tu es devenu Capitaine au long cours, et même, d´après Maman, Commandant par interim le plus jeune de France. Tu n´es pas pour moi un être d´exception, mais ta décision de te former seul te fait à mes yeux " un être de quelque relief". J´aurais bien aimé quetu m´apprennes le nom de cinq ou six étoiles en me les montrant du doigt comme tu l´as fait pour ma soeur. As-tu lu de Celine Voyage au bout de la nuit  et Mort à crédit qui a suivi ? La fin de ce second roman est assez prenante. Tu ne peux pas ignorer que Mort à crédit, a été dédié à Lucien Descaves. Excuse-moi. Je me projette encore dans mes lectures. Au point où j´en suis, je ne peux m´empêcher de mentionner Gide et Barrès. Ils se sont bien empoignés au sujet du "racinement". Est-ce le vent marin qui a permis ton envol ?

Il y a un jour ou deux, je me suis bien amusé.J´ai fait se rencontrer Villon et Rabelais. Car Rabelais, figure-toi, connaissait très bien Saint-Genou. Sûrement mieux que Villon. J´ai joint à la discussion Panurge le bonimenteur. C´est à lui que j´ai donné le mot de la fin. A vrai dire, j´ai un peu triché. Je ne les ai pas vraiment fait parler. Il serait peut-être plaisant de reprendre un jour cette idée. Je doute d´en être capable. Qu´en penses-tu ?

Ton volume des Oeuvres de Rabelais est bien abimé. Du livre premier,"La vie tres horrifique du grand Gargantua", j´ai la notice du même Pierre Jannet qui a écrit l´introduction de ton Villon annoté de ta petite écriture. Quelle érudition ! Pour le texte-même de Rabelais, beaucoup de pages manquent. Les huit premières sont très sales et déchirées. Puis on passe sans transition à la page 81. Le livre deuxième "Faictz et prouesses espouvantables de Pantagruel"  commence à la page 109 de ce même tome premier. C´est ainsi que j´ai pu vérifier, après avoir faussement fait parler hier Villon, Rabelais et Panurge, la langue originnelle de Rabelais. Les auteurs de manuels scolaires sont des pleutres. Ils ont châtré Rabelais !
Les mots "con" , "braguette" et "couillon" ont été supprimés. Ces mots crus, je le sais, ne t´offusquent pas, car j´ai trouvé dans la marge du huitain CI du "Grand Testament"de ton Villon deux traits de crayon qui montrent que tu t´es bien amusé en le lisant. Je ne peux m´empêcher de recopier pour toi tout ce huitain : " Item, à l´orfèvre Du Boys, / Donne cent clouz, queues et testes, / Du gingembre sarazinoys, / Non pas pour accoupler ses boytes, / Mais pour conjoindre culz et coettes, / Et couldre jambons et andoilles, / Tant que le laict en monte aux tettes, / Et le sang en devalle aux coilles."

Du tome second des Oeuvres de Rabelais, je n´ai que la couverture et la table des matières. Je me demande où il a bien pu passer. Peut-être a-t-il été perdu lorsque Maman a prêté ton Rabelais à une certaine Renate, Allemande d´origine, mariée à un Francais, mère de plusieurs enfants, et franc-maconne comme toi et Maman. Elle avait besoin d´un Rabelais en langue originale pour passer son agrégation d´allemand. Maman a dû attendre des années avant de récupérer son bien. C´est Renate qui m´a fait lire ce beau roman de formation qu´est Jean- Christophe de Romain Rolland. C´est elle aussi qui a trouvé la famille allemande de Landschulheim près de Gosslar où j´ai commencé véritablement à lire, en me souvenant pour toujours de cet oxymoron insolite mais magnifique au détour d´une page de L´Immoraliste de Gide : "la douce acidité des oranges" .

Toutes les pages de ton Rabelais étaient dans un désorde indescriptible. Beaucoup de pages étaient volantes. J´ai eu un mal fou à bien les ordonner. Elles se trouvent dans un dossier à couverture rose sale. Plusieurs sont même maculées. La tranche n´existe plus. Ni du dossier,ni du livre. Sur la page de couverture, tu as écrit au crayon de papier noir : " Voyage au Mexique" ; puis, légèrement au dessous, en lettres un peu plus grosses et de couleur bleue : "Voyage au Chili". Ce n´était pas la première fois que je lisais ces noms de pays écrits de ta main sur cette couverture sale. Ils m´ont à nouveau fait rêver. Ou plutôt, ce qui m´a fait rêver, c´est ta petite écriture. Où as-tu déniché ce Rabelais ? Au Chili ou à Paris ? 

Après avoir relu hier dans ton Rabelais incomplet la description célèbre de Gargantua qui passe sans transitions des lamentations aux pleurs de joie, j´ai eu l´idée de me procurer une édition identique à ton Rabelais, annotée par Pierre Jannet et illustrée par A. Robida. Ce matin, un peu avant l´aube, j´ai trouvé en quelques minutes qu´il était possible de choisir entre plusieurs exemplaires dans diffférentes librairies de France et d´ailleurs. Sache qu´on n´acquiert plus aujourd´hui un livre ancien comme autrefois en fouinant dans une librairie spécialisée en livres rares. On fouine sur le net ! Ca a moins de charrme, mais c´est  rapide et très pratique. Ce serait trop long de t´expliquer comment on fait ca. Le monde depuis ton décès a bien changé. Mais, pour citer Villon tout en le contredisant, : "  Je [ne] plaings [pas] le temps de ma jeunesse" . Sache simplement que j´ai trouvé seize librairies différentes. J´ai hésité entre l´offre d´un libraire de Rouen et celle d´un libraire suisse de Neuchâtel. C´était les moins chères. J´ai finalement renoncé. Je ne suis pas bibliophile. Je suis lecteur, non collectionneur. Posséder des livres reliés ou non sans les lire ne m´intéresse pas. Ou plutôt, ne m´intéresse plus. Ton Rabelais incomplet et sale suffit à mon bonheur. Comme ton Villon. Plus quelques autres dont j´ai commencé à te parler, même si tu ne peux avoir lus certains. C´est, pour le moment, uniquement entre toi et moi que je dis ca. Enfin... , presque.

Au point où j´en suis, je dois te faire un aveu. Après mon divorce et mon dernier déménagement, j´ai jeté la quasi totalité des livres de ta bibliothèque. J´ai aussi jeté beaucoup de mes propres livres. Glisser cet aveu en fin de lettre montre que ce n´est pas si simple à expliquer. Il faut savoir, dit-on, désherber une bibliothèque. Belle formule. Mais c´est un peu plus compliqué que ca. En tout cas pour moi. J´espère que tu me pardonnes. J´essaierai un jour de m´expliquer davantage. Devenir un homme, c´est sans doute, comme le dit Créon dans Antigone d´Anouilh, regarder son père, un jour, en face. Il a sûrement raison. Il faut que tu le saches : Tes livres ne me sont plus un fardeau.

Je t´embrasse affectueusement.

Ton fils

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5 septembre 2007 3 05 /09 /septembre /2007 12:49

RabelaisRobida1.jpg
[ 11 ] - J´ai cité hier quelques mots de Villon en langue originale. Je crois qu´elles sont exactes.J´ai également cité quelques phrases de Rabelais en me référant à une édition scolaire de renom, Lagarde et Michard. Etudiant en littérature à Bergen puis Oslo, j´ai lu presque intégralement Rabelais, projetant d´écrire un mémoire de maîtrise sur lui. Avant de choisir,  sur le conseil d´un éminent  enseignant, ,un écrivain contemporain. Ca été, finalement, Georges Perec . De Rabelais, je ne possède plus l´ édition dans laquelle je l´ai lu, et qui était celle des Classiques Garnier. Mais je possède de mon père une édition dépareillée des oeuvres de Rabelais, très sale et déchirée. Je ne l´avais jamais vraiment ouverte. Pour la première fois de ma vie, j´ai fait aujourd´hui autre chose que de la manipuler pour la changer de place dans ma bibliothèque. Elle est en très mauvais état. Un grand nombre de pages manque. Je n´ai pu trouver sa date de parution. Mais elle est précédée d´une notice du même Pierre Jannet qui a écrit l´introduction du Villon de mon père. J´ai retrouvé les lamentations de Gargantua à la mort de Badebec sa femme, et les pleurs de joie du même Gargantua à la naissance de son fils Pantagruel.

Horreur ! Vérole de moine ! Par ma chandelle verte, notre Père Ebé Râblé a été censuré !  

La truculence de la langue originelle de Rabelais est à nulle autre pareille :

"Ha ! Badebec, ma mignonne, m´amye, mon petit con ( toutesfois elle en avoit bien troys arpens et deux sexterées), ma tendrette, ma braguette, ma savate, ma pantoufle, jamais je ne te verray". (... ) Et ce disant pleuroit comme une vache ; mais tout soubdain rioit comme un veau quand  Pantagruel luy venoit en memoire. " Ho ! mon petit filz (disoit-il), mon coillon, mon peton, que tu es joly, et tant je suis tenu à Dieu de ce qu´il m´a donné un si beau filz, tant joyeux. tant riant, tant joly ! ho, ho, ho, ho ! que je suis ayse ! beuvons, ho ! laissons toute mélancolie".

J´ai trouvé sur l´Encyclopédie libre Wikipédia deux-trois lignes sur Pierre Jannet. Il a vécu de 1820 à 1870. C´est un éditeur et un bibliophile qui s´est spécialisé dans les oeuvres du XVIe siècle. Par respect pour son travail, je tiens à citer la fin de la dernière phrase de conclusion de sa notice, toute entière consacrée à " la biographie authentique ( sic ) de Rabelais " : "...Les historiettes empreintes de bouffonnerie pantagruélique (...) doi[vent] être écarté[es] par la critique moderne, surtout dans une étude faite, comme celle-ci, pour accompagner une édition où rien n´est laissé à l´arbitraire et qui est dans toutes ses parties une oeuvre de stricte et sobre érudition." 

Une envie folle me vient à l´esprit. Où pourrais-je aujourd´hui me procurer les pages perdues de l´édition de mon père ? ( ... / ... 12 ).

NB ! La photo ci dessus ne reproduit pas la page de couverture de l´édition aux pages manquantes que je possède. Les illustrations sont bien du même A. Robida, mais l´éditeur est différent...

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4 septembre 2007 2 04 /09 /septembre /2007 12:49

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[ 10 ] - Le Villon de mon père est un livre que je prends souvent. J´aime l´avoir en mains et sentir l´odeur un peu âcre des pages jaunies et piquées. Il s´ouvre automatiquement à une page où le nom du village de Saint-Genou dans l´Indre est souligné d´un trait de crayon ferme. C´est là que mon père est né un certain 24 décembre 1905. [ Ci contre : Saint-Genou vers 1900, avec au fond son abbatiale. ]

Villon écrit, au huitain XCIV du "Petit Testament " : "Filles sont belles et gentes / Demourantes à Sainct-Genou". L´édition de mon père date de 1867. L´introduction est d´un certain Pierre Jannet. Le style est désuet, ce qui donne du charme. Jannet, sans doute disciple et peut-être même émule de Taine, insiste davantage - comme il se doit pour l´époque - sur la vie que sur l´oeuvre de Villon, notamment sur la vie dissipée de l´étudiant pauvre. " En ce temps. comme plus tard, les étudiants étaient exposés à bien des tentations. Villon n´y sut pas résister." Et insensiblement, Jannet passe au côté mauvais garçon de Villon, comme s´il y avait une relation de cause à effet. En ce qui concerne Saint Genou, Jannet note cependant qu´il n´est pas certain que Villon soit passé à Saint Genou. 

Je ne sais ce que Villon était pour mon père. Ce qui est sûr, c´est qu´il l´a lu et annoté. Il y a dans la marge du volume qui est désormais le mien, un grand nombre de mots qui précisent en français moderne certains mots de Villon difficiles à comprendre aujourd´hui. Ce qui est sûr aussi, c´est que Villon est pour moi l´écrivain français qui a su le mieux parler de la mort, comme René Char, poète combattant et résistant , est celui qui a su le mieux parler des ténèbres, ayant assisté à la mort de nombreux résistants pendant la seconde Guerre mondiale. Villon écrit notamment dans le huitain XLI du "Grand Testament" : "La mort le faict fremir, palir, / Le nez courber, les veines tendre, / Le col enfler, la chair molir, / Joinctes et nerfs croistre et estendre. / Corps feminin, qui tant est tendre, / Polly, souef, si precieulx, / Te faudra-il ces maulx attendre ? / Ouy, ou tout vif aller ès cieulx." 

Pour ma part, je n´ai été à Saint-Genou qu´une seule fois dans ma vie, lors d´une après-midi accablante de chaleur, pendant l´été 1999 ; pour consulter pendant deux ou trois heures les actes d´état civil de la commune. C´ est alors que j´ai appris que Rabelais a bien connu Saint-Genou. Et je me suis mis à rêver d´une rencontre entre le mauvais garçon Villon effrayé par la mort  (1431-14??) de la fin du Moyen-Âge et le bon vivant Rabelais de la Renaissance vantant la dive bouteille (1494-1553). Mais que se seraient-ils dit ? Et où se seraient-ils rencontrés ? Dans une taverne bruyante et enfumée ? Ou dans la nef silencieuse d´une abbatiale envahie de l´odeur pénétrante de l´encens ?

C´est, je crois, lors de l´accouchement de Badelec, que Rabelais parle la première fois de Saint-Genou, quand Gargantua fait appel à " une horde de vieilles de Brisepaille, d´après Saint-Genou." - Autrement dit des sages-femmes. Rabelais précise en effet un peu plus loin . " L´une d´entre d´elles, ayant la réputation d´être grand médicine, vient de Brisepaille, un hameau près de Saint-Genou." 

On connaît la suite, c´est-à dire le " A boire, à boire ! " du fils Gargantua, et, dans un autre texte publié plus tard, les pleurs et les rires du père Grandgousier, oscillant entre la douleur d´avoir perdu sa femme Badelec, " [s]a mignonne, [s]´amie, [s]a tendrette, [s]a savate, [s]a pantoufle", et la joie d´avoir un fils " [s]on petit fils, [s]on peton" , riant soudain "comme un veau" après avoir pleuré "comme une vache".

Certains doctes universitaires rablaisiens ont voulu voir dans ce contraste une moquerie des discussions scolastiques sans fin et sans valeur sur la vie pratique ; à moins que ce ne soit les vaines dissertations littéraires sur la mort. Loin de moi de sous-estimer cette lecture entre les lignes. Plus me chaut le bon gros sens de Gargantua qui fait triompher la vie : des pleurs ne permettront jamais de ressusciter une morte, dût-elle s´appeler Badelec. Sa mort est irrémédiable. " Autant nous pend au nez ". Ce que Gargantua dit en ces termes : " Autant nous en pend l´oeil. Dieu gard´le demeurant. Il me faut penser d´en trouver une autre."

Personne mieux que Villon n´a parlé de la mort. Personne mieux que Rabelais n´a parlé de la vie. Qui de Villon ou de Rabelais aurait remporté la discussion s´ils avaient dû se rencontrer ? A supposer qu´ils se parlassent. Peut-être, tout compte fait, auraient-ils simplement dégoisé à la taverne du lieu, l´un disant : "Ho, ho, que nous sommes aise. Laissons toute mélancolie. Buvons! ". L´autre anticipant une replique célèbre : "Qu´il est facile de faire des contes ". 

Au point où j´en suis, je crois décent d´inviter Panurge, le rusé et apte à tout faire Panurge, au demeurant le meilleur fils du monde. Sophiste à tout rompre, bon à tout et propre à rien, il ne pourrait que conclure selon les termes qu´il a employés après l´achat puis la perte de son mouton : "  J´ai eu du passe-temps pour plus de cinquante mille francs": ( ... / ..11 ).


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3 septembre 2007 1 03 /09 /septembre /2007 07:46
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La maison du retour
de Jean-Paul Kauffman ( Nil-éditions, 2007, 19 € ) est un livre émouvant. C´est autant le récit d´un amour pour une maison acquise que celui d´un journaliste qui prend conscience qu´il mue en écrivain. 

On se souvient peut-être de ce journaliste qui a été retenu otage trois ans au Liban entre 1985 et 1989. Si mes souvenirs sont bons, c´est son nom que ses confrères journalistes d´une chaîne de télévision nationale francaise ont martelé tous les jours, en affichant  sur l´écran au début de chaque nouveau JT, le nombre exact de jours de détention. A sa sortie d´avion sur le sol francais, il n´a pas reconnu tout de suite les jeunes garcons qui se sont précipités vers lui pour l´embrasser. Ses fils n´étaient en effet plus des enfants mais des adolescents.

Cela fait presque vingt ans qu´il a été libéré. Sa carrure d´écrivain s´est considérablement élargie. Mais ce n´est qu´aujourd´hui qu´il publie ses impressions sur ces années de détention, qu´il considère plus un échec qu´un malheur. Auparavant, il ne faisait que tourner autour.
 
Pour renaître à la vie, tourner la page, il s´est acheté une maison dans les Landes où il n´avait aucunes racines : ce plat pays n´était pas le sien. Mais il est tombé amoureux et de sa maison et de sa forêt. Ou plutôt de son airial, terme régionnal parfaitement reconnu des Landais, et que le francais mérite : espace vaguement engazonné, non clôturé, peuplé d´arbres centenaires.

La maison qu´il a acquise sur un coup de foudre au détour d´un tournant un matin froid de fin décembre était vide, à l´abandon, et même délaissée et volontairement ignorée car les habitants du coin cherchaient à l´oublier à cause de son passé trouble ; comme si elle était hantée par de mauvais esprits. Investie par les soldats de la Wehrmacht à la fin de la guerre, elle avait en effet été transformée en maison close ; les filles venaient de Bordeaux. Jean-Paul Kauffmann a restauré la maison pièce après pièce comme il s´est reconstruit jour après jour, mois après mois. Ce livre est le récit de sa convalescence, La maison du retour est le retour à la vie. Il refuse cependant ce qu´il appelle le " syndrome de Luis de León", du nom de ce théologien fameux qui fut arrêté du temps de l´Inquisition au milieu d´un cours. Torturé, puis condamné, León passa une dizaine d´années en prison. Libéré, il reprit son enseignement par ces mots : " Comme je disais hier ...". Pour Kauffmann, c´est tout le contraire. Ses trois années de détention l´ont profondément marqué. Elles lui ont laissé le sentiment " d´avoir en trois ans épuisé une vie d´homme ". Mais il se refuse au pathos. Ce n´est pour lui ni une tragédie, ni même un malheur : ce n´est qu´un échec.

Si rien ne sera comme avant, il aime cependant toujours les Bordeaux grands crus. Il ne les goûte pas en aveugle. La connaissance de l´étiquette et du prix joue son rôle. Il en parle en vrai amateur. C´est d´ailleurs en utilisant la métaphore du vin ( Le Bordeaux retrouvé, hors commerce, 1989 ), qu´il a parlé pour la première de sa captivité. Pierre Assouline, qui en a recu un exemplaire, en parle très bien d´une manière à la fois personnelle et émouvante dans son blog à l´article intitulé des arbres plutôt que des livres. Jean-Paul Kaufmann est aussi un grand amateur de cigares. N´empêche : ses rapports a l´existence ont changé. Un certain élan vital est perdu, notamment son amour des livres. Il préfère désormais les arbres. Les arbres de son airial ont remplacé sa bibliothèque.

Durant sa détention, la lecture d´ouvrages aux titres les plus imprévus que ses goeliers lui permettaient parfois de lire, l´ont sauvé. Il a pu ainsi concentrer son esprit autrement qu´en regardant les moisissures des murs de sa cellule ; ce que beaucoup de prisonniers font jour après jour. Mais c´est bien pendant cette détention forcée que ses cinq sens se sont éveillés. Une fois libéré, il a de plus en plus eu recours à eux. Et  dix-huit ans ans après, il continue encore à les explorer. Ce beau récit littéraire qu´il nous donne à lire en est le témoin. 

Ce qui compte désormais pour lui, c´est de savourer les choses simples de l´existence, les côtés élémentaires de la vie, et d´en rendre compte par les mots : goûter un vin en allant chercher son bouquet, sentir les effluves des platanes et des pins, écouter à l´envi un air adoré de Haydn ou, plus simplement, les chants des milliers d´ oiseaux qui peuplent les arbres de son airial ; et regarder toujours et encore, sans jamais se lasser, les arbres centenaires aussi bien que les nouvelles essences qu´il a plantées et qui ont su s´adapter dans l´alios ingrat du sol landais comme l´orme de Sibérie ou le micocoulier. Il est, à soixante ans, comme cet octogénaire qui plantait. 

Jamais, pendant sa captivité, il n´avait lu avec autant d´intensité les livres qu´on lui jetait en pâture. Le sens était alors secondaire. Mais les mots étaient ses complices. C´est la lecture qui lui a permis de sortir de son cachot, d´oubler sa cellule. Il est inutile de dire qu´il ne cherche en rien à retrouver l´acuité perdue. Depuis son élargissement, il lit désormais à distance. Sa manière de lire le Virgile, en édition scolaire qu´il a découvert dans sa propriété des Tilleuls, en est la preuve : à petites doses, une page par ci, un page par là. Il trouve certes les métaphores de Virgile un peu convenues. Il reconnaît néanmoins que Virgile, dans Les Géorgiques, sait montrer que le commerce de l´homme avec la nature n´est pas toujours facile. Mais en même temps, c´est la fraîcheur des métaphores qui le réjouit le plus. A sa lecture, dans son airial replanté et désherbé comme on peut le faire d´une bibliothèque, il réapprend le monde en l´épelant comme un enfant peut le faire : arbres, nuages, ciel, vent... . Sa captivité forcée l´a éveillé à écouter les bruits, sentir les odeurs, découvir les couleurs, toucher les objets les plus simples. Ce livre est le récit de la découverte des sensations que lui révèlent  ses cinq sens. Sa retirade l´a fait naître à l´écriture. La maison du retour est autant le récit d´une régénération ( comme l´acacia en était le symbole dans ancienne Egypte ),  que le récit de la naissance d´un écrivain qui s´est trouvé. A mettre de toute urgence dans une bibliothèque, qu´elle soit exsangue, désherbée ou opulente. 
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1 septembre 2007 6 01 /09 /septembre /2007 11:43

Beaucoup de publicités m´énervent. Je les trouve presque toujours absconses et confuses. A moins qu´elles ne soient abstruses. Quoique, quelquefois... Le slogan d´une publicité de mon enfance est toujours dans ma mémoire : " Aux Galeries Lafayette, j´achète les yeux fermés". - "Quand je les ouvre, j´achète au Louvre". Elle fut retirée des ondes et à l´affiche après seulement quelques jours, ayant été condamnée pour concurrence déloyable : une publicité ne peut en effet mentionner le nom d´un concurrent. C´est en tout cas à la suite de la campagne des pastilles Valda contre la toux : "Va mal ..., Valda ..., Va bien ..." que j´ai délaissé les cachous Tartempion pour les valdas. Et j´aime toujours acheter l´apéritif à base de vin Dubonnet, même si je ne sais plus si c´est pour son bouquet, son étiquette, ses affiches dans les tunnels du métro parisien de mon enfance ou une certaine Tante Karen.

La publicité norvégienne que j´ai vue cette nuit pendant mon insomnie et le 50 kilomètres marche des championnats du monde 2007 d´athlétisme à Osaka (Japon), - au cours duquel le Francais Yohan Diniz a sauvé l´honneur de l´équipe de France en remportant une belle médaille d´argent -, n´est faite que d´images. Il n´y a donc aucun dialogue. Y a-t-il même un slogan ? Je ne saurais encore le dire. J´espère la revoir. Je ne me souviens même pas de la marque. Uniquement du produit. C´est donc qu´il lui manque quelque chose. Mais l´enchaînement des images était d´une belle truculence. Décapant à souhait, plein d´humour et d´ironie joyeuse. 
portable.jpg
Le produit est ce petit objet que tout le monde emporte avec soi où qu´on aille aujourd´hui, que ce soit les transports en commun,  le supermarché du coin ou même l´Opéra, et qu´on appelle portable. A moins que ce soit un mobile. Avec tous ces synonymes, je m´y perds un peu. Bref, un téléphone amovible si petit qu´il est parfois difficile de savoir où on l´a posé.

Un homme jeune en jeans, mal rasé et habillé d´une chemise à col ouvert , entre, hagard, dans la cuisine. Une femme s´y trouve, en robe de chambre, lisant le journal du matin. C´est donc l´heure du petit déjeuner. L´homme est visiblement tressé. Il n´a pas un mot pour sa compagne. Mais est-ce sa compagne ? Rien ne me permet de l´affirmer. Elle peut tout ausi bien être sa femme. La vaisselle n´est pas faite. Fébrile, il déplace avec une telle  brusquerie une assiette sur la table que celle-ci manque de tomber ; il déchire presque les pages du journal que la femme tient grand ouvert entre les mains ; il se précipite vers l´évier, et change de place en un clin d´oeil verres, assiettes et casseroles qui s´entrechoquent. La femme le suit du regard, non pas agacée, mais, me semble-t-il, amusée. Elle fint par se lever, très calme et maîtresse d´elle-même. Elle décroche le récepteur d´un téléphone mural au long fil torsadé, et compose calmement un numéro. L´homme est de plus en plus fébrile. Il arpente comme un fou en cage les quelques mètres carrés de la cuisine, et met sens dessus dessous  vaisselle, vêtements et autres objets de la  petite cuisine, quand tout à coup retentit deux ou trois fois un petit bip sonore. Interloqué, il s´arrête, et finit par localiser le son qu´il entend. Son portable était dans le frigidaire, entre le beurre et  un reste de poulet froid. Il se détend enfin et esquisse vers la femme une mimique en coin qui se veut sans doute un sourire. Mais il ne peut encore mettre son portable dans la poche de son veston déformé(e ?). Il lui faut d´abord sortir un tube entamé de caviar Mills. Sans un mot de remerciement, plus soulagé me semble-t-il que reconnaissant, il gagne la porte qui heureusement n´a pas claqué.

Je ne saurais dire si le sourire de la femme était amusé, indulgent, ironique, compatissant ou condescendant. Mais c´est en souriant qu´elle a reposé sur le socle accroché au mur le recepteur du téléphone au long fil torsadé.

Les portables d´au jour d´aujourd´hui (sic), ainsi que les téléphones de naguère et plus encore de jadis sont bien différents de ceux de mon enfance et de mes premières années en Norvège. L´image du couple dans la publicité aussi. Sans parler de celle de la femme, de la famille et de la place des grands-parents et de l´enfant dans la société occidentale d´aujourd´hui. Mais je ne peux supporter qu´un journal tabloïde norvégien à audience nationale utilise une gifle comme argument de vente. C´est, me semble-t-il, introduire dans la publicité une violence qui ne devrait pas avoir sa place. Qu´elle soit de plus en plus présente dans les médias et le cinéma me suffit. Une gifle est un aveu d´impuissance, non un "argument frappant" . Ce ne peut non plus être une réponse ou une lecon. Une gifle ne fera jamais rien comprendre.

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