Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
28 février 2007 3 28 /02 /février /2007 18:24

LANCELOT Marcel Olivier ( Capitaine au long cours-officier marine marchande ) 24/12/1905 Saint-Genou (36) - 28/02/1945 Grandersheim (Allemagne).

Extrait de Nicholas Monsarrat, La mer cruelle, trad. Hélène Claireau, Editions Phébus, 2004.

"Quand ils reprirent la mer, ils essuyèrent une tempête d´une violence telle que, lorsque le cinquième jour se leva sur la lutte fantastique que soutenait le Saltash contre les flots déchaînés pour arriver seulement jusqu´au sud de l´Islande, Ericson se dit que c´était le pire temps de toute la guerre, le pire du monde entier. La mer était devenue comme un champ de bataille rugissant, où l´ouragan chassait et soulevait les navires comme des bouts de papier. Le convoi n´avait plus la forme d´un convoi ; un bateau était à peine un bateau dans cette immensité hurlante. Ce tumultueux coup de vent du sud, croissant en furie de jour en jour, semblait animé d´une méchanceté à laquelle on ne pouvait échapper ; chaque navire était comme un fugitif désespéré, condamné à être lynché par une foule dont les mouvements avaient passé d´une mauvaise humeur maladroite à une rage aveugle. De gigantesques vagues se précipitaient en grondant sur les pygmées qui devaient être leurs proies ; parfois la surface toute entière de la mer se soulevait d´un coup, et le navire qui se trouvait sur le chemin de son assaut tremblait et chancelait tandis que des tonnes d´eau verte s´écroulaient sur son pont et dévalaient en torrent sur toute sa longueur. Les embarcations étaient fracassées, les cheminées bosselées, les passerelles et les roufs écrasés ; des hommes disparaissaient par-dessus bord sans une trace, sans un cri, balayés de la vie comme des images effacées d´un tableau noir par un impérieux coup d´éponge. Même quand les vagues retenaient un moment leurs coups, le vent, qui hurlait et s´acharnait dans le gréement, serrait de peur chaque coeur ; car s´il était capable d´arracher du matériel du pont, les hommes ne pouvaient résister à sa force terrible. Pour l´équipage du Saltash, il n´y avait plus de convoi et plus d´autres vaisseaux que le leur ; ils étaient depuis tant de jours et tant de nuits effroyables la proie des éléments qu´ils pouvaient être vaincus par leur seule brutalité. Le Saltash avait déjà affronté bien des tempêtes et avait eu souvent de la force de reste pour venir en aide à d´autres navires en difficulté, mais à présent uniquement préoccupé de lui-même, il peinait pour rester à flot, accomplissant heure après heure et jour après jour, les manoeuvres désespérées d´un bateau qui refusait, sous la contrainte la plus violente, de se laisser engloutir. Pendant tout ce temps, un plaisantin ne cessait de chanter dans le haut-parleur une berceuse censée calmer le navire et la mer."

Lithographie de Théodore Gudin (1802-1880) Coup de vent sur le banc de Terre Neuve, 1828

Lien No1 : Circumnavigation ; Lien No2 : Le manque ; Lien No3 : L´appartement de mom enfance ; Lien No4 : Père et mère réunis ? ; lien No 5 : Mon père, cet inconnu ; Lien No6 : Magnolia et seringas ; Lien No 7 : Le Planétarium.

 

Partager cet article

Repost0

commentaires

Présentation

  • : Souvenirs et impressions littéraires
  • Souvenirs et impressions littéraires
  • : Souvenirs et impressions littéraires (d´un professeur retraité expatrié en Norvège)
  • Contact

Recherche