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8 février 2007 4 08 /02 /février /2007 06:45

J´ai dans ma salle de séjour un petit secrétaire que j´ai reçu en cadeau d´anniversaire il y a presque cinquante ans. C´est à l´initiative de ma soeur que je l´ai reçu. Il a été fait spécialement pour moi. Même s´il est moins vieux que moi, il est bien fatigué. Il n´empêche que je l´aime particulièrement. Il renferme de vieux papiers que je n´ose jeter, mais aussi plusieurs albums de photos que je commence à regarder assez souvent, pas seulement par nostagie. Il suffit d´en ouvrir un et de regarder une ou deux photos qui commencent à pâlir pour que surgisse au fond de ma mémoire un chapelet de souvenirs ensevelis que je croyais perdus à jamais, mais qui sont curieusement enchaînés les uns aux autres. Il me suffit d´en retrouver un pour que d´autres reviennent sans que je sache toujours vraiment pourquoi ils sont liés ensemble. La volonté de continuer à écrire sur eux me permettra peut-être un jour de créer le fil qui puisse les relier en une suite cohérente, pour un récit de plus longue haleine.

L´un de ces albums concerne un voyage à Paris en décembre 1998 que j´ai fait après mon divorce avec celle qui ne fut, malheureusement, jamais vraiment ma compagne.

Le vendredi 25 décembre, soit le lendemain de Noël, j´ai souhaité aller au cimetière du Père Lachaise où ma mère a été incinérée selon ses souhaits. Franc-maçonne de toujours, elle avait plusieurs fois émis le voeu d´être incinérée, sans jamais vraiment expliquer ses raisons. A sa mort, je n´ai trouvé aucun papier officiel genre testament ou lettre manuscripte du genre "mes dernières volontés". J´ai cependant voulu que son souhait oral réitéré soit respecté, autant pour elle-même que pour mon père qui lui avait "apporté la lumière". J´y vois aujourd´hui autant un désir d´anéantissement total qu´un souhait non avoué de purification par le feu. Il n´est cependant pas exclu que cette appréciation puisse encore évoluer avec le temps.

De Norvège, j´avais pris pris contact par téléphone avec la Vénérable de son ancienne loge, une certaine Violette S., qui avait prévenu les frères et soeurs qui connaissaient ma mère pour son engagement maçonnique sans faille. La cérémonie ne s´est pas vraiment passée selon mes voeux. Aucune prise de paroles n´a été faite entre les extraits de musique maçonnique ; mais il y avait du monde : ses amis de très longue date, ses proches immédiats, quelques membres éloignés de sa famille et un grand nombre de frères et soeurs de Paris, de Lille et d´autres villes de  province. Il faisait ce jour-là un froid de canard. Par décence, je ne rapporterai pas les mots qui ont été échangés à la fin de la cérémonie entre certaines personnes, ma femme Toril et moi, et en présence de Paul et Suzanne, les amis intimes et d´enfance de ma mère. Mais je crains de m´égarer et perds de vue ce que je voulais dire.

Le 25 décembre 1998, le jour où j´ai souhaité orner d´une rose rouge, - fleur que ma mère aimait par dessus tout -, l´urne et la case où sont déposées ses cendres,  j´ai découvert au cimetière du Père Lachaise le monument de la FNDIRP, autrement dit le monument de la Fédération Nationale des Déportés et Internés Résistants et Patriotes. De son vivant, ma mère avait souhaité que l´on fasse des recherches pour que le corps de mon père, probablement enterré dans une fosse commune du camp de concentration de Gandersheim, soit ramené en France, et qu´ainsi, le jour de sa mort, elle puisse être mise à ses côtés. Elle a finalement renoncé à cette idée, car rien, à vrai dire, ne pouvait prouver que le corps rapatrié serait réellement celui de mon père. J´étais trop jeune pour que ma soeur aînée et ma mère me demandent sérieusement mon avis. La décision finalement prise de ne faire aucune démarche a sûrement été dictée par la sagesse. L´idée avait cependant du panache et une incontestable noblesse.

Il est possible que je phantasme, que je donne à des hasards des significations qu´ils n´ont pas. Il n´empêche que de découvrir un 25 décembre 1998 le Monument aux morts érigé en la mémoire des Déportés et Internés Résistants et Patriotes de France m´étreint fortement : mon père est né un 24 décembre, ma mère a vu le jour une Saint-Jean, et elle a été incinérée dans les premiers jours glacials d´un mois de février comme aujourd´ hui. Je sens que ma mère n´est pas si éloignée de mon père dans l´éternité en  ce jour de quasi anniversaire.

A la base du monument érigé à la mémoire des hommes comme mon père, se trouvent ces mots gravés de Paul Eluard : " Du plus profond de leur enfer, ils n´ont jamais cessé de lutter pour leur vie et pour leur dignité, et ils rêvaient d´un monde de justice et de fraternité".

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