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17 septembre 2006 7 17 /09 /septembre /2006 04:56

C´était Noël et je devais avoir 5 ans et demi ou 6 ans et demi. J´étais très impatient car j´avais dicté à ma mère une lettre destinée au Père Noël. Je désirais entre autres choses un train électrique. Je passais souvent devant le magasin de jouets de l´Avenue Emile Zola et c´était toujours avec envie et admiration que je voyais le petit train de la vitrine tourner indéfiniment avec sa petite locomotive et tous ses wagons accrochés l´un derrière l´autre. Il s´arrêtait parfois à un passage à niveau et une petite lampe rouge s´allumait. J´étais fasciné ! Le jour de Noël arrive enfin. C´était donc le 25 décembre au matin. Je vais dans la chambre de ma mère où il y avait une cheminée dans laquelle on ne faisait jamais de feu. Nous avions en effet dans la cuisine une chaudìère que l´on remplissait de charbon pour chauffer tout l´appartement. Je vois bien près de la cheminée une grand boîte, mais ce qui attire mon attention, c´est un vélo ! Il était en partie installé dans l´âtre de la cheminée; la roue arrière en sortait. Incrédule, je m´approche et demande à ma mère et à ma soeur comment le Père Noël a pu faire pour glisser dans le trou de la cheminée le vélo tout entier. Des explications s´ensuivent auxquelles je ne comprends rien. Je regarde le trou, je regarde le vélo.... On finit par détourner mon attention en me faisant remarquer qu´il y a un paquet que je n´ai pas encore ouvert. Je l´ouvre mais je pense toujours au vélo et au trou de la cheminée. C´était un train mécanique. Il y avait une locomotive avec un petit trou sur le côté droit. On la remontait à l´aide d´une clef de métal que l´on mettait dans le trou. Le train pouvait tourner quelques tours en tirant poussivement quelques wagons et s´arrêtait. Il fallait à nouveau remonter le mécanisme de la locomotive avec la petite clef. J´étais bien un peu déçu, mais le Père Noël m´avait apporté un vélo....Ce n´était pas rien !

 La matinée s´avance et je demande si je peux descendre dans la rue pour jouer. Il était rare que l´on me dise non. Je descends donc. Je rencontre un ou deux petits camarades et nous parlons des jouets que nous avons reçus. Tout fier, j´explique que le Père Noël m´a apporté un vélo. - "L e Père Noël n´existe pas !" s´exclame l´un de mes petits camarades. Je reste incrédule, essaye d´argumenter et finis par accepter ce qu´ils ne font que répéter : "Le Père Noël n´existe pas ! C´est une invention des parents !".... Je pars alors en courant, monte quatre à quatre les deux étages de mon immeuble, et demande, furieux, si c´est vrai que le Père Noël n´existe pas. Embarrassé, on finit par me dire que c´est vrai. Je me précipite alors sur mon train mécanique toujours installé sur le plancher, saisis avec rage la locomotive et la jette de toutes mes forces sur le sol en hurlant : - "Tu m´as menti ! Tu savais bien, toi, que je voulais un train électrique!" On me rappela souvent cette rage. Je n´étais pas très fier. La locomotive était brisée, et je crois bien n´avoir plus jamais essayé de jouer enfant au petit train. 

Mais j´appris très vite à faire du vélo ! Il me suffit de deux ou trois après-midi pour savoir en faire. Nous allions ma mère, ma soeur et moi au Champ de Mars à pied en tenant le vélo par le guidon. C´est ma soeur qui tenait de sa main le porte-bagages placé à l´arrière du vélo et qui maintenait mon équilibre. Je n´ai jamais eu de stabilisateur aux deux roues arrières du vélo. Ma mère me regardait, debout pas très loin, ou assise sur un banc.

 A un bout du Champ de Mars se trouvait l´Ecole Militaire et à l´autre bout La Tour Eiffel. Les allées sont spacieuses, les arbres magnifiques, les bosquets d´arbustes nombreux et les pelouses très bien entretenues. De petits écriteaux portant l´inscription "Pelouse interdite" étaient bien plantés sur chaque pelouse, mais personne ne disait jamais rien si quelqu´un marchait dessus et je n´ai jamais entendu de gardien siffler comme un forcené dans son sifflet pour exiger aux contrevenants de quitter la pelouse. Adulte, j´ai souvent dit à mes divers amis et collègues que j´avais appris à marcher et à faire du vélo sous la Tour Eiffel. Ce n´est pas tout à fait vrai, mais ce n´est pas vraiment faux non plus. Je pouvais faire du vélo à loisir dans toutes les allées caillouteuses du parc et c´est avec frénésie que je m´élançais à toute vitesse pour freiner brusquement et laisser derrière moi une longue trainée de terre brune. Je pouvais rencontrer d´autres enfants et nous faisions souvent la course. Je dépensais ainsi mon trop plein d´énergie, comme pouvait dire ma mère.

Il y avait aussi dans le Champ de Mars un petit manège de chevaux de bois où l´on m´emmenait souvent. Il y avait toujours la queue. Il fallait attendre sagement les uns derrière les autres, une piècette à la main. Le manège s´arrêtait, les garcons et les filles devant s´avancaient, les premiers montaient sur un petit cheval et le manège repartait. C´était délicieux d´attendre son tour ! Quand mon tour arrivait, je recevais un petit bâton, et le jeu consistait à décrocher à chaque tour un petit anneau qui se trouvait au-dessus de nos têtes. Celui ou celle qui avait réussi à enfiler le plus grand nombre d´anneaux autour de son bâton recevait un petit cadeau. Je ne me lassais jamais de ce manège. Je n´étais pas peu fier quand c´était moi qui gagnais ! 

C´est aussi au Champ de Mars que je faisais du patin à roulettes. Une allée plus large que les autres était spécialement aménagée pour ça. La chaussée était goudronnée, d´une couleur grise mouchetée de blanc. A chaque extrémité de l´allée se trouvait une barrière basse peinte en partie en rouge qui empêchait les voitures de passer. J´y allais souvent , d´abord accompagné, puis seul. C´est là que je passais une grande partie de mes jeudis après-midi quand je n´avais pas d´école; - ou de mes dimanches. On pouvait aussi faire du vélo, mais la piste était trop petite, et c´est à partir du Champ de Mars, si mes souvenirs sont bons, que j´ai commencé à faire tout seul du vélo dans Paris. Les voisins et les commerçants de la rue où j´habitais traitaient ma mère d´inconsciente. Elle était bien inquiète, mais elle me laissait faire, car elle savait désormais que malgré son interdiction je l´aurais fait quand même. C´est ainsi que j´appris peu à peu à "explorer" Paris, d´abord le XVe arrondissement où j´habitais, puis le XVIe où j´allais à l´école; et plus tard encore dans les autres arrondissements de Paris. C´est ainsi que j´allais souvent faire du patin à roulettes sur l`esplanade du Trocadéro d´où l´on découvre en enfilade la Tour Eiffel et tout le Champ de Mars.  A vrai dire c´était interdit d´en faire, mais il y avait rarement des gardiens pour nous en empêcher. Et puis, l´esplanade était toujours pleine de curieux et de touristes provinciaux et étrangers qui nous regardaient. Le jeu consistait à aller le plus vite possible, passer entre les passants sans les heurter et à sauter les quelques marches qui se trouvent là. Quand je suis à Paris avec des étrangers qui ne connaissent pas Paris, je ne manque jamais de leur montrer la Tour Eiffel du haut de cette esplanade. Il y a toujours autant d´enfants, d´adolescents et même de jeunes adultes des deux sexes drôlement habillés qui sautent les quelques marches de l´esplanade, mais ce n´est plus en patins à roulettes. Ils utilisent des skateboards ou des rollers. C´est beaucoup plus moderne, mais c´est finalement la même chose ! Paris change beaucoup, mais certains lieux sont toujours aussi fréquentés et animés qu´autrefois.Cela permet de ne pas être trop perdu devant l´éternel changement.

 

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