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1 octobre 2009 4 01 /10 /octobre /2009 14:27

Les carnets secrets du Bernin
, de Loïc Aubry (Ed. Jean-Marie Bordessoules, 2009, 372 pages, 20,90 €) est une très belle oeuvre romanesque dans laquelle les considérations les plus sérieuses sur l´art et les moeurs de la Rome baroque du XVIIe siècle sont aussi pleines d´humour et d´ironie. Elle a pour sous-titre La Vérité dévoilée. Ce sous-titre est essentiel. Il annonce un double désir : celui que Loïc Aubry a découvert dans ces carnets fictifs, et celui que Le Bernin aurait lui-même caché et que personne avant lui n´aurait osé représenter dans la pierre. Ce n´est sans doute pas faux. J´oserai pourtant affirmer que la réalité est probablement un peu plus complexe. 

Le cardinal Gian Battista Pamphili devenu pape en 1644 sous le nom d´Innocent X  n´avait sans doute pas la sensibilté artiste et une connaissance aussi approndie de l´art grec et romain du pape précédent Urbain VIII Barberini et ami personnel de Gian Lorenzo Bernini. Mais il avait une haute estime de son rôle de chef de toute la chrétienté. Son souci n´était rien moins que le triomphe de la Contre-Réforme sur le monde ; d´où la disgrâce qu´il imposa dès son élection au talentueux Bernini, comme pour obliger ce dernier à accepter le déni que la chrétienté cherchait à imposer ; - et comme par ricochet, étouffer la charge érotique de ses oeuvres sculptées, trop inspirées à son goût de sa connaissance intime de la femme, de son art d´aimer, et de ses lectures fort personnelles des MétamorphosesOvide. Il lui commanda pourtant, après seulement trois ans de disgrâce, d´ériger au centre de la piazza Navona l´une de ses oeuvres maîtresses, La Fontaine des quatre Fleuves, reconnaissant ainsi la supériorité éclatante de son génie de sculpteur.

Il est admis que cette disgrâce a profondément blessé Le Bernin dans son orgueil. Son élan, sans être émasculé, aurait été émoussé. L´oeuvre monumentale qu´est La Vérité qu´il a entreprise pour lui seul de 1646 à 1652, en dehors de toute commande, semble pourtant attester du contraire, même si elle reste inachevée. Elle transcrit dans le marbre que le temps finit toujours par dévoiler la vérité. Sans doute. Il faut pourtant espérer que non. Le secret des plus grandes oeuvres excède largement ce que les plus grands admirateurs ou non ont toujours cru devoir nous dire sur elles. C´est parce qu´elles émanent du plus intime de l´être qu´elles sont grandes et restent au cours des siècles une énigme. Elles affirment en fait ceci : que le créateur n´a rien d´autre à dire que sa représentation du monde et ce qu´il croit comprendre de la vie. C´est dire, me semble-t-il, que les plus belles oeuvres que Le Bernin nous a laissées sont encore loin de nous livrer toute leur vérité. Le Temps n´a pas fini son oeuvre.

Autre lien :- Apollon et Daphné
                       - L`Art d´aimerOvide

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